Je n'avais jamais compris pourquoi moi, James Potter, avait été nommé préfet en chef. Je n'étais ni sage et raisonnable comme Lupin, ou plutôt comme Lupin apparaissait au professeur, ni avide de respecter et de faire respecter le règlement comme Lily. Je n'écoutais pas vraiment en cours, au contraire d'Alice et de bien d'autres. Non je pense que la seule raison qui ait poussé Dumbledore à m'offrir ce grade, c'était que l'on m'obéissait. Les moins courageux me craignaient même. Et moi, je n'avais peur de rien. Quoi qu'il en soit j'avais eu ce poste. Poste qui en récompense cachait aussi de nombreux avantages dont le plus notable était bien sûr l'entrée à l'immense salle de bains privé des préfets. C'était donc ici même, dans celle spacieuse salle de bain, que j'avais emmené Sirius après notre course effrénée dans tout le château dans le but de fuir notre directrice. Nous venions à l'instant de faire une bien belle bêtise comme on en avait l'habitude, mais le boucan qui s'était ensuivi avait attiré la professeur droit sur nous comme un faucon sur sa proie. Elle avait immédiatement pensé à nous, mais sans preuve, sans nous voir, elle ne pouvait nous punir. Voilà pourquoi Patmol et moi avions pris la fuite.
J'avais adoré commettre cette blague avec mon meilleur ami. En plus d'être un de mes passe-temps préféré, c'en était surtout un qui n'avait pas changé depuis le tourbillon. Nous avions seulement eu de nouvelles idées plus drôles les unes que les autres. Rire avec Sirius était un des meilleurs moyens de me détendre et ces temps-ci, je ne demandais que ça. Mon sourire éclatant ne m'avait pas quitté de tout l'après-midi et je retrouvais la complète joie de vivre que je perdais par moments dans cette époque troublée. Et finir notre aventure dans cette pièce était le sommet que l'on pouvait trouver. Relaxation et détente après course et stress, mais toujours dans la joie.

Riant et soufflant en même temps, je m'avançais vers l'immense piscine dont l'eau était si calme que l'on aurait pu la penser gelée. Mis à part notre respiration et l’écho de nos éclats de rire, il n'y avait aucun bruit dans la salle, pas une goutte d'eau qui ne s'écoulait des nombreux robinets rutilants d'or. Je jetais un coup d’œil au serviettes empilées sur ma gauche, nuage de douceur et de chaleur qui donnait envie de se pelotonner dedans. J'allais m'approcher pour allumer un robinet qui je me rappelais offrait de la mousse rose abondante et gonflée, quand Sirius me retint par le bras. A peine retourné, je le vis un immense sourire aux lèvres, les yeux rieurs me chuchoter dans le ton de la confidence :

- James ... Tu sais que moi je ne suis pas préfet, n'est-ce pas ? Et que de ce fait... Je n'ai rien à faire ici ?!

Je sourit à mon tour, me rappelant ce détail qui ne ferait qu'ajouter du piquant à notre escapade.
Je lui donnais une tape sur l'épaule et m'apprêtais à le rassurer et à l'inviter à me suivre, quand je me rendis compte que je n'avais pas à faire ça, et ravalais immédiatement mes paroles. Car si moi je m'amuserais, qui me disait que Sirius lui, ne serait pas en train de s’inquiéter d'être découvert à chaque instant. Si nous étions pris, je regarderais la scène à travers les mousses, car personne ne pouvait rien me reprocher. Mon meilleur ami lui, serait férocement puni. En particulier si McGonagall le trouvait, car elle serait très vexé de ne pas avoir réussi à nous démasquer pour le coup de tout à l'heure. Je rouvrais la bouche, conscient que ce n'était donc pas à moi de décidé pour Sirius, mais priant pour qu'il accepte de rester, tant j'avais envie de lui faire découvrir les merveilles du bain moussant et m'arrêtais un instant de sourire pour lui montrer que je ne lui en voudrais pas s'il préférait partir.

- Dit Pat', justement, tu sais que si on se fait chopé, il y a que toi qui en pâtira. Donc c'est à toi et seulement à toi de décider si on reste ou non ..

Le silence retomba. Silence si profond que l'on entendit nettement des bruits de pas lourds derrière la porte. Pas qui n'appartenaient pas au professeur McGonagall ..

Spoiler:

Severus avait passé toute la matinée de ce samedi dans la salle d'études des runes à préparer le projet auquel le professeur leur avait demandé de réfléchir. C'était une de ses matières préférées, et les runes pouvaient servir de support à la création de sortilège, alors il n'hésitait pas à s'y investir. Et il préférait travailler dans la salle de cours, où les bureaux étaient adaptés aux tracés de diagrammes de grande taille, plutôt que dans la bibliothèque ou dans la salle commune, où les tables étaient rarement assez larges, surtout quand il fallait les partager avec d'autres élèves.

Il était plutôt satisfait de ce qu'il avait fait. Il faudrait qu'il contrôle encore la précision de certaines de ses traductions et vérifie qu'il n'y ait aucun risque d'homonymie ou de double sens, mais tout semblait se tenir. Mais une fois de plus, il avait été tellement absorbé par ce qu'il faisait qu'il avait laissé passer l'heure de déjeuner. C'est pourquoi il entreprenait à présent de redescendre tous les étages jusqu'au rez-de-chaussée, pour aller directement obtenir des elfes de la cuisine quelque chose à grignoter.

Malheureusement, il semblerait que son estomac soit destiné à ne pas être satisfait de sitôt, car après être descendu au cinquième étage, Severus réalisa que l'escalier situé dans le prolongement qu'il avait eu l'intention d'emprunter était dans sa période "cache-marche" : certains escaliers de Poudlard, quand ils s'ennuyaient, jouaient à faire disparaître leurs marches aléatoirement, et cela pouvait durer longtemps. Severus, ne se sentant pas d'humeur particulièrement suicidaire, renonça donc à passer par là et suivit le couloir principal du cinquième étage pour rejoindre un autre escalier descendant.

Cependant, alors qu'il approchait, il entendit venir de ce même escalier des grommellements caractéristiques. Réprimant une imprécation, il se précipita vers une tapisserie abritant un passage secret pour se dissimuler derrière. Et juste à temps, car quelques instants après Rusard arrivait.

N'allez pas croire que Severus craignait d'être aperçu par le concierge parce qu'il avait causé quelque trouble et cherchait à éviter une punition. Ce n'était pas ça du tout. C'était même tout le contraire. Le Serpentard évitait Rusard car celui-ci témoignait d'une telle affection à son égard qu'il se sentait extrêmement mal à l'aise. La première fois qu'ils s'étaient croisés, le concierge avait eu les yeux embués, avait insisté pour qu'il vienne prendre un verre avec lui dans son bureau, et lui avait parlé pendant plus d'une heure de combien il lui manquait de n'avoir plus personne avec qui parler des châtiments que méritaient les petits monstres qui salissaient son établissement, des indigestions de sa chatte, et des Weasley qui devraient être condamnés à la peine capitale pour avoir commercialisé des Pétards-Chasse-Rusard. Quand il avait enfin réussi à prendre congé, Severus en était sorti traumatisé. Et déterminé à soigneusement éviter toute réédition de cette expérience.

Au passage du concierge, Severus distingua certains des mots qu'il marmonnait.

« ... pendus par les oreilles... pendus par les orteils... toilettage... ma pauvre Miss Teigne... affreux... armures en vrac... bruit à réveiller les morts... perdent rien pour attendre... pensais en avoir fini avec eux... monstres... noyés à la naissance... »

Tout en marmonnant, le concierge parcourait le couloir de son pas pesant, ouvrant tour à tour chacune des portes. D'ailleurs, quand il stoppa au niveau de la salle de bains des préfets, il prononça le mot de passe suffisamment distinctement pour que Severus l'entende, et décide de le retenir. Il changeait rarement, et ça pouvait toujours servir. Mais il trouvait infiniment perturbant que le concierge puisse accéder à une salle de bains où des élèves étaient susceptibles de se trouver... Il espérait sincèrement que personne n'y soit actuellement, si discuter avec Rusard était déjà traumatisant, il n'osait imaginer ce que ça ferait de se trouver nu face à lui...

Heureusement, la question ne se posa pas, car la voix vibrante d'autorité de la Directrice résonna dans tout l'étage, tandis qu'elle enjoignait Argus à la rejoindre immédiatement pour inspecter les toilettes pour hommes du quatrième étage. Rusard rebroussa donc chemin d'un pas toujours brinquebalant mais beaucoup plus rapide, et redescendit. Severus put alors sortir de sa cachette. Il laissa passer un temps avant de prendre l'escalier, pour bien laisser le concierge prendre de l'avance, mais tandis qu'il attendait, il entendit des voix et des éclats de rire provenant de la salle de bains voisine. Des voix et des rires qu'il connaissait trop bien pour ne pas les reconnaître. Et instantanément, son seul désir fut de les faire taire.

Il savait que c'était absolument mesquin, immature, et surtout stupide. Mais il ne pouvait s'en empêcher. Dès qu'ils étaient à proximité, la rage l'emplissait. Et s'ils avaient l'air un tant soit peu heureux, il ne rêvait que de les plonger dans l'agonie. Ils avaient manqué de le tuer. Ils n'avaient aucun droit d'être si joyeux, si libres, si pleins d'avenir. Il avait appris à contrôler ses pulsions, à les maîtriser grâce à l'occlumancie. Mais même étouffée, la rage n'en demeurait pas moins présente, étouffante, nécessitant d'être extériorisée.

Alors en quelques pas Severus se retrouva devant la porte de la salle de bains des préfets, il murmura le mot de passe qu'il avait entendu Rusard prononcer, et ouvrit grand la porte.

« Viens, mon petit Cerf, viens faire un câlin à tonton Sirius ! »

Le regard dur, une moue méprisante aux lèvres, Severus arqua un sourcil et s'adossa au chambranle de la porte, sans chercher à s'avancer. Il les observa, et attendit qu'ils remarquent sa présence pour commenter.

« Tonton ? Comme c'est mignon. Vous pimentez vos ébats en y ajoutant une touche d'inceste ? »

Toujours aussi méprisant, il continua à les toiser du regard. Bien évidemment, quand il était entré, non seulement Sirius était en train de réclamer un câlin, mais lui et James étaient pratiquement l'un contre l'autre, dans leurs vêtements trempés leur collant à la peau... Severus aurait pu faire fortune et déclencher une ruée de fangirls en commercialisant une mini-pensine contenant ce souvenir. D'ailleurs, il n'excluait pas totalement cette option. Après tout, il manquait cruellement de fonds.

Spoiler:

Sirius s'était lentement approché du grand bassin mousseux comme pour mieux l'observer. Je me souvenais de la première fois que j'avais franchi la porte de la salle de bain, près de deux ans plus tôt, lorsque j'avais reçu le mot de passe peu après mon badge de capitaine de l'équipe de Quidditch de Gryffondor, ma fierté. J'avais été obnubilé par la richesse et l'immensité des lieux et était resté la bouche ouverte sur le pas de la porte, a essayé de tout voir en même temps. Je n'étais pourtant pas quelqu'un habitué à la laideur ou à la pauvreté, ni même à la médiocrité, mais la salle de bain, et surtout la gigantesque piscine m'avait coupé le souffle. Je comprenais donc très bien l’émerveillement de Sirius et je souris face à sa joie.
Mon ami s'était approché tout près du bord de la piscine, légèrement penché, admirant ou la piscine ou son reflet, qu'importe ; j'avais pris son avancé pour une réponse positive à ma question, et riant d'avance à tout ce que nous pourrions faire dans la pièce, je m'avançais le rejoindre. Mais deux ou trois mètre encore me séparaient de lui quand sa position trop tentante me fit me précipiter et le pousser de toutes mes forces en avant, où je le vis plonger la mousse la tête la première. Un fous rire me prit et je ne pût même pas répondre à sa question, essayant simplement de hocher la tête tant le regarder, un chapeau de mousse sur ses cheveux détrempés, ses habits lourd d'eau moulant son corps plutôt musclés, m'empêchait de reprendre son sérieux. Mais effectivement, j'avais décidé sans le consulter de manière politiquement correcte qu'il resterait avec moi. Après tout, je le connaissais assez pour deviner sa réponse avant même d'avoir posé la question.
Patmol se mot à rire à son tour et s’extirpa difficilement de l'eau par la force des bras, se dirigeant vers moi pour m'étreindre dans un but de vengeance plus que d'affection. Je me débattais en riant toujours quand nous entendîmes la porte s'ouvrir dans un grincement. D'un même mouvement, nous nous retournâmes et nos yeux se posèrent sur la personne que le moins nous avions envie de croiser, et qui à coup sûr risquait de rendre notre après-midi moins drôle, à moins d'en profiter pour l'embêter un peu, j'ai nommé Severus Rogue.
Les lèvres de notre pire ennemi s'étirèrent dans un sourire sadique lorsqu'il nous vit ainsi, trempés jusqu'aux os, dégoulinant de mousse, dans une prise digne de catch et elles laissèrent échapper sa voix nasillarde que personne ne rêvait d'entendre.

- Tonton ? Comme c'est mignon. Vous pimentez vos ébats en y ajoutant une touche d'inceste ?

Il faisait mine de s'appuyer négligemment contre la chambranle, tentant de nous faire croire qu'il était très à l'aise, mais je le savais bouillant de rage, et peut être d'appréhension. Après tout, il se trouvait être seul contre ses deux pires ennemis, qui était tout à fait capable de l'attaquer juste pour rire.
Sa remarque me fit à demi-sourire, à demi bouillonné : A nouveau, il n'avait pas compris l'ironie de nos petites piques et de nos provocations que nous échangions quotidiennement. Savoir ainsi rire de quelque chose que tout deux savions totalement faux prouvait encore plus, si elle avait besoin d'une nouvelle preuve, la puissance de notre amitié. Mais Servilus était trop seul pour le comprendre, je m'en doutais. Ce qui m'énervait, c'était qu'il se mêle de tout, qu'il gâche notre après-midi, qu'il parle, car je détestais atrocement sa voix, qu'il soit là aussi. Sa simple présence me révulsait.
Lançant un clin d’œil à Sirius, je me dégageais de ses bras pour m'avancer vers notre vieil ennemi, et posant nonchalamment ma main à deux petits centimètre de son visage, je le fixais dans les yeux.

- Qu'est-ce que tu y connais toi, de l'inceste ? chuchotais-je dans un murmure que seul lui et mon meilleur ami pouvait comprendre Tu l'as déjà expérimenté ? Après tout, c'est peut être ta seule façon d'avoir des rapports, c'est vrai ça, qui d'autres que ta mère pourrait bien vouloir de toi ?

Ma voix était chargé de méchanceté, et une lueur d'amusement était né dans mes yeux. Au fond de moi, je savais combien il était bas de le persécuté ainsi, et combien ce n'était pas digne de moi, mais je n'écoutais que rarement cette petite voix. Et si je l'avais écouté, j'aurais su que ma haine envers Severus naissait sûrement de la jalousie que je portais sur son amitié avec ma dulcinée ...

Spoiler: