« Céder à la tentation, c'est foutre sa vie en l'air »

Il est déjà plus de dix heures du matin et Julius a un certain mal de tête, une envie certaine de rentrer chez lui mais il ne peut pas parce que sa place au ministère tient à un fil et qu’il est hors de question qu’il la laisse filer. Mais il aimerait pouvoir se faire malade. Sans qu’on dise que le sale mangemort avait des problèmes des consciences. Oui, il a pris la marque et il le regrette, il pense l’avoir dit assez pendant son procès. Ou peut-être que justement, il regrette que Voldemort ait perdu. Ou il regrette que cet homme inhumain ait tant négligé un gamin de dix-sept ans qui l’avait déjà détruit une fois – ce n’est pas le genre de choses dont on ne se soucie pas pourtant mince – et soit mort. Parce que Julius continue à haïr les moldus. Parce que son père le battait quand il était gosse et que c’est une raison suffisante pour les détester. Parce qu’ils ont brûlé des sorciers, des tas de sorciers par peur. C’est ce que fait l’humain, il se referme, se replie sur soi et devient méchant, cruel pour sauver sa peau, pour se rassurer quand il a peur. Oui, c’est ce qu’il fait honnêtement, ça le dégoûte. Et il aime à penser que les sorciers sont plus que des animaux avec une conscience. Lui, il ne fait pas que manger, dormir, boire et baiser. Non, lui – les sorciers – font plus que cela, il veut y croire, il y croit. Désespérément. Il soupire, passe une main dans ses cheveux et tourne dans son fauteuil. Il se demande s’il n’est pas un peu trop naïf sur les bords. S’il ne vit pas la vie d’un stéréotype, le portrait qu’il voulait être. Père de famille – mais honnêtement il aurait aimé qu’on apprenne la signification du mot non à sa fille – avec une femme qu’il aime – pourtant elle lui donne sérieusement mal à la tête les trois quarts du temps – et un boulot bien positionné qui lui permet de gagner de l’argent – mais à cause de la guerre, il ne lui reste plus que l’argent qu’il avait caché ce qui revient tout de même à un petit pactole – et de vivre la vie qu’il a toujours pensé mériter. Oui, peut-être qu’il vit un stéréotype. Et après… Après…

Les minutes s’écoulent de plus en plus lentement et il se demande si on n’a pas ralenti le temps juste pour l’emmerder juste encore un peu parce qu’honnêtement il n’est plus à ça près. Il en est là dans ses pensées quand sa secrétaire apparaît. Il lui lance un regard noir, le genre de regard qui dit : « je sais qui tu es sale mangemort » et il envisage de l’étriper avant de se dire que ça n’arrangera rien. « Une femme veut vous voir, elle dit que c’est urgent et qu’elle ne partira pas avant d’avoir pu vous parler. » Julius soupire, si c’est une folle qui vient l’accuser d’il ne sait quoi, il pète un câble et immigre dans une communauté sorcière d’esquimaux. Pour le restant de ses jours. Sa secrétaire s’efface et laisse place à une magnifique brune. L’attention de Julius se reconnecte brutalement. Il se redresse dans son fauteuil, tripote un dossier pour faire croire qu’il est occupé tout en lui lançant un sourire en coin qui fait son charme. Sa secrétaire referme la porte et il laisse passer une minute de silence complet, pour l’intimider. Mais ça n’a pas l’air de marcher parce qu’elle le fixe avec un air amusé sur le visage. « Bonjour. Vous vouliez me voir mademoiselle ? » « Je suis la fille d’Elijah. » Julius se crispe aussitôt à l’entente de ce mot. Il la regarde et d’un coup, il le sent nettement moins. Pour ceux qui ne savent pas qui est Elijah, c’est la dernière trouvaille de son fils. Oui, à six ans elle voulait un poney, après un rat dont il s’occupe et d’autres trucs de ce genre. A quinze ans, visiblement, elle voulait un drogué. Pour le plus grand malheur de son part qui regarde sa fille chérie tomber amoureuse d’un délinquant qui n’en a visiblement que pour son cul et son fric. Et le sien de fric. Et peut-être de cul. Mais c’est une histoire qu’il ne veut pas évoquer. Vraiment pas. Mais honnêtement, il n’est pas sourd. Cette histoire de défaillance temporelle, il en a entendu parler. Si elle est là pour lui annoncer qu’il est grand-père… Salazar ne peut-il pas avoir pitié de lui ? « D’accord. » Parce que zut, que peut-il dire d’autre ? La supplier de ne pas être sortie du vagin de sa fille quand elle n’avait pas encore vingt ans, de ne pas être la fille d’un drogué qui n’aime pas sa mère et qui la bat peut-être ? Oui, c’est un peu près l’estime qu’il a d’Elijah. « Je m’appelle Mulan. Mulan Corcoran. » Là, il n’est pas sûr de devoir comprendre quelque chose. Elle fait partie de sa famille ? Elle porte son nom ? Pourquoi porte-elle son nom ? Si elle est la fille d’Elijah ? « Je suis aussi ta fille. » Le reste est très confus dans l’esprit du brun. L’histoire de potion, grossesse masculin et de « comme les Potter-Malfoy » lui passe au dessus de la tête parce qu’il en a à faire de Potter et de Malfoy lui ? Il ne comprend pas. Elle ne peut pas… Etre sa fille. C’est une menteuse. Il lui dit. Ah. Elle sait que son père le battait quand il était gosse. Il n’y a qu’un membre de sa famille qui peut savoir ça. Mais… Il est en était de choc. N’importe qui le serait. Qu’on lui annonce que dans le futur il a viré gay après avoir été marié à une femme pendant presque quinze ans et faire un gosse au copain de sa fille, c’est tordu au possible. Ouais. Tordu au possible, très bizarre, complètement fou. Non, il ne comprend pas. Même si elle ressemble à Elijah, même si elle sait des choses sur lui. « Papa ? » C’est l’électrochoc. « Sors d’ici. Qui que tu sois, sors d’ici. Je ne veux pas te voir, pas t’entendre, pas entendre… » Il a crié et il se dit vaguement qu’il fait une crise de nerf. La brune le regarde et lui laisse ses coordonnés si elle veut le joindre. Puis part. Et il manque de faire un anévrisme dans la journée quand il s’imagine prendre Elijah sur son bureau. Merde, c’est quoi son problème ?